Épisode cévenol des 8 et 9 septembre 2002.

 

Voici un rappel de consignes de sécurité dans de telles situations:

En cas d'orage ou d'alerte orageuse:
- Ne pas utiliser d'appareils électriques, y compris le téléphone fixe. 
- Ne pas toucher à son installation électrique.
- Ne pas monter sur le toit, par exemple pour réparer une fuite, avant l'orage ou toute autre situation comportant un risque de foudroiement.

En cas d'inondation:
- Dès l'alerte, obturer avec des sacs de sable, des panneaux de bois etc. les ouvertures susceptibles d'être envahies par les eaux.
- Couper le disjoncteur dans les habitations, soulever les meubles et prendre des précautions pour éviter les rez-de-chaussée, se placer dans les étages.
- Éviter tout déplacement à pied ou en voiture.
- A pied, le risque est de perdre tout repère ou d'être emporté par les flots. Invisibles, les obstacles et dangers éventuels, tels que des branchages, des bouches d'égouts, peuvent devenir mortels.
- En voiture, il faut vite choisir entre la quitter et se réfugier en hauteur ou rouler vers un secteur abrité. Le courant est susceptible d'emporter un piéton, mais aussi un véhicule, y compris un camion. Éviter les cuvettes et se diriger vers les points hauts. Essayer de se repérer, en faisant attention aux pièges que constituent les fossés et bas-côtés. Ne pas stationner n'importe où pour éviter tout risque de sur accident.
- Écouter la radio. 
- Se faire connaître de ses voisins, grâce à des moyens de fortune type chiffons ou panneaux aux fenêtres, et si possible des pompiers ou des gendarmes pour faciliter les secours.
- Ne pas porter de bottes ou de chaussures lourdes et/ou difficiles à enlever qui peuvent conduire à la noyade lorsqu'elles se remplissent d'eau.

Il y a donc eu 23 morts dans ces inondations. La majorité de ces décès sont liés à des imprudences. Sur bon nombre de routes inondées que j'ai pu voir, je ne comptais plus les gens qui se faisaient prendre au piège. J'ai remarqué que ce sont les habitants de la région qui semblaient commettre le plus d'imprudences. Plusieurs personnes m'ont dit vouloir à tout prix rentrer chez elles et tentaient de passer sur des routes inondées. Tandis que les personnes qui ne sont pas de la région semblent plus prudentes (touristes, personnes en transit...), elles s'arrêtent sur des endroits sécurisés et attendent que cela se passe. Ceci est peut être à discuter mais c'est en tout cas ce que j'ai constaté. En voiture il ne faut surtout pas s'engager sur une route recouverte d'eau si l'on est pas sûr que le niveau le permette. Dans le doute, ne pas s'aventurer et faire demi tour. Il n'en faut pas beaucoup pour se faire coincer, il suffit que de l'eau rentre dans le moteur par le filtre à air ou provoque des problèmes électriques pour que la voiture cale. Et généralement ça ne redémarre pas. Si le niveau d'eau monte encore, il faut abandonner le véhicule. Ça c'est dans le cas d'une montée de l'eau non "brutale", en cas de vague je vous laisse imaginer le danger encouru. Dans l'eau il est préférable de rouler en 1ère pour avoir plus de puissance, moins de 20cm suffisent à ralentir considérablement la voiture. Et dans le cas où il y aurait du courant, même avec un faible niveau, ne pas tenter de passer.

Autre cas de figure encore plus dangereux: dans une vallée, près d'une rivière... Il faut éviter les creux lorsqu'il pleut autant. L'eau peut montrer très rapidement, une vague peut vous emporter.

La prévention, le système d'alerte:

Comme nous l'avons vu au début de ce dossier, le phénomène a plutôt été bien prévu. Sauf sur la quantité des pluies, ce qui change tout. La prévision de la quantité d'eau repose sur les modèles, or on sait que ce paramètre est difficile à cerner par les calculateurs même les plus puissants, surtout dans cette région. Je pense qu'il est plus prudent de parler de risque que de dire il tombera tant de millimètres. Il faut suivre ensuite ce qu'il se passe en temps réel et mettre en place des alertes au cas où la situation dégénèrerait. Sur cet épisode, la première alerte a été lancée dimanche matin, de niveau orange, soit le 3ème niveau sur 4, ce qui quand même doit faire prendre conscience qu'un certain danger risque de se produire. Mais pourquoi avoir attendu dimanche matin, soit quelques heures avant que tout ne commence, pour prévenir les médias et la population alors que plusieurs jours avant on parlait d'un risque potentiellement élevé? Pourtant Météo France savait qu'une situation propice à de fortes pluies allait se mettre en place car le modèle CEP (modèle européen dont se sert et auquel participe Météo France) voyait comme l'AVN cité en début de dossier ces orages. Même sans dire avec certitude que les orages éclateront, il doit certainement être possible de faire passer un message disant qu'il y a un risque. La culture du risque météo (chère à Guy Plaut) en France métropolitaine est assez mauvaise, des alertes sont lancées mais pas assez de monde n'en tient compte, croyant que cela n'arrive qu'aux autres ; preuve en est avec cette alerte orange, les orages éclataient le dimanche après-midi mais il y avait encore beaucoup de monde dehors, sur les routes...  Dans une région où les risques sont aussi grands, la prudence aurait dû être de rigueur! En France les orages semblent banalisés, il y en a souvent et, proportionnellement comparés à d'autres pays du monde, les dégâts et les victimes sont peu nombreux. On se dit qu'on ne risque certainement pas grand chose lorsque l'on est sous un orage, jusqu'au jour où... Aux Antilles par exemple, la culture du risque est bien meilleure, lorsqu'un cyclone est attendu, les gens restent cloîtrés chez eux et prennent toutes les précautions, mais là bas les cyclones ne sont pas aussi nombreux que nos orages. L'Homme a l'air d'avoir la mémoire courte et doit se dire un peu trop souvent "ça n'arrive qu'aux autres".

Voici un mail reçu par un internaute (Nicolas Jouy) après avoir lu ce dossier (publication avec son autorisation):

"Mathieu,
chapeau très bas pour ce reportage à la fois scientifique et humain. Votre document devrait faire l'objet d'un montage pour la télé afin de sensibiliser les gens. J'habite à Montpellier et je me souviens très bien du Dimanche 8 Septembre. J'étais à la foire annuelle aux associations de Montpellier (en plein air) où je participais à un stand. Le matin j'avais entendu à la radio l'alerte niveau 3 sur l'Hérault ce qui moi m'inquiétais. Le ciel était très foncé mais il pleuvait faiblement par intermittence. Le matin sur le stand j'en parle à mes amis qui me disent "Bof! la météo se trompe toujours" etc., etc... Autour aucun stand ne bougeait. Il a fallu que le maire de Montpellier arrivé vers midi pour l'inauguration dise "il y a alerte niveau 3, à 13h, tout le monde doit avoir plié ou je fais évacuer par la police".
Eh bien il a fallu que la police pousse les gens à plier y compris notre stand, ou j'exhortais mes copains de plier vu qu'on était déjà trempés! La meilleure c'est que des amis étaient venus d'Alès (!) nous rejoindre dans la matinée et qu'ils n'étaient pas inquiets. A 13h il est tombé brutalement un déluge qui a duré 1h puis ça s'est calmé. Mais je me souviens très bien de ces nuages noirs qui fonçaient à toute vitesse vers le Nord. Pour nos amis d'Alès on a été sans nouvelles pendant 48h. Ils nous ont dit s'être arrêtés à Nîmes pour 2 nuits car il était impossible d'aller plus loin....
Comme vous le dites, ici il y a régulièrement des gros orages à l'automne et les gens ne réalisent pas. C'est vrai que cet épisode était vraiment exceptionnel.
Encore bravo pour ce reportage.
 
Nicolas Jouy"

Tout est dit dans ce mail. On voit très bien que le risque météo n'est pas assez pris au sérieux, il faudra absolument travailler là dessus ces prochaines années. On peut certainement éviter des morts.

Pendant l'épisode, tous les services de secours ont été débordés, de plus les réseaux de téléphones fixes et portables étaient par endroit hors service. Dans certaines communes, des maisons entières ont été englouties. Parfois les habitants ont été prévenus au dernier moment, parfois ils ne l'ont pas été. En étant sur place, il était clair que la situation devenait exceptionnelle! Météo France a placé le département du Gard en alerte rouge, niveau maximum, dans la nuit de dimanche à lundi à 1h37, un peu tard selon mon opinion, je ne sais pas si une personne de Météo France était sur le terrain?:

Alerte rouge d'accord, mais il faudrait peut être qu'elle arrive à destination, c'est à dire à la population! Les médias auraient dû la diffuser. Mais rien de cela, ce n'est que le matin que la majorité de la population a appris que le Gard était en alerte rouge. Sur France Info, le bulletin météo de la nuit ne mentionnait pas cette alerte, quelle inorganisation! Météo France devrait obliger les médias à diffuser les informations importantes. Dans certains villages, on a entendu dire que le curé a dû sonner le tocsin pour alerter les gens. Pourquoi ne pas faire sonner les sirènes de la commune lorsque de graves inondations se produisent, ou encore faire défiler un bandeau déroulant à la télévision? Une surveillance en temps réel, avec du personnel sur le terrain et une transmission directe des informations à des centres de décisions, une collaboration totale avec les médias, toutes ces mesures devraient permettre une amélioration certaine dans l'information du grand public, et, à fortiori, un nombre moins élevés de victimes.

Nous entendons parler depuis quelque temps d'un système d'avertissement automatique des crues par téléphone, cela s'annonce prometteur et pourrait permettre d'éviter des drames, à suivre donc.

Il y a également un flagrant problème d'urbanisation et de construction en zones inondables, mais je ne développerai pas ce sujet, ce n'est pas mon domaine. Retenons juste que l'eau passera encore là où elle est déjà passée et que les records sont faits pour être battus.

Je tenais enfin à dire un grand bravo à la radio locale France Bleu Gard Lozère qui a été d'une grande utilité et qui a fait un excellent travail pour aider au mieux les sinistrés! Site internet: http://www.radiofrance.fr/sites/bleu-gardlozere/sommaire/

Site de Météonew qui publie également un dossier sur cet épisode

 

6 ans après, qu'en est il de la protection crue de la région?

Une rapide passage sur la basse vallée du Vidourle m'a permis de constater que la politique de protection est toujours l'endiguement en basse vallée. Logique vu le nombre d'habitations près du cours d'eau... Mais l'endiguement entraîne une forte accélération des débits en cas de crue puisque la rivière ne peut pas s'étendre en largeur. En cas de rupture de digue les conséquences seraient encore dramatiques comme cu fût le cas à Aramon. Le prochain épisode similaire à 2002 verra certainement l'histoire se répéter, peut-être en plus grave en raison de l'urbanisation croissante.

Dossier mis en ligne le 28 octobre 2002 et mis à jour le 20 décembre 2002, en avril 2004 et le 26 août 2008.

Mathieu Barbery

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